Quelles perspectives pour une autre mondialisation, écologique et solidaire

DEBAT : 10 ans après la création d’ATTAC, le monde est confronté à plusieurs crises (financière, alimentaire, sociale et écologique) qui ont des causes communes, notamment l’accentuation des exigences de rendement du capitalisme financier et un modèle de développement productiviste. Face à cette évolution, quelles perspectives pouvons-nous avancer, notamment en France et en Europe, pour déboucher sur une autre mondialisation écologique et solidaire ?
Débat animé par Marc CHOVIN (ATTAC 63) et Marc DELEPOUVE, secrétaire général d’ATTAC France.

COMPTE-RENDU RESUME DE L’INTERVENTION DE MARC DELEPOUVE.

Face aux crises actuelles, il faut avoir l’ambition d’apporter des réponses aux problèmes de l’environnement et de l’humanité.
• Faut-il aujourd’hui viser la suppression du capitalisme ou bien limiter son champ et contrôler fortement son activité ? Le débat existe au sein d’Attac ; les avis divergent, mais il y a un consensus sur le court et le proche moyen terme pour réduire le champs d’activité du capitalisme (en extraire les banques, la santé, l’éducation…) et pour poser des règles fortes au sein de ce champ. .
• Le G20 risque de se limiter aux aspects les plus autodestructeurs pour le capitalisme financier lui-même. Les mesures prises n’ont pas stoppé la crise financière mais ont limité sa chute. L’effet boule de neige entre crise financière et crise de la production ne peut être arrêté facilement.
• La crise écologique n’a pas attendu le néolibéralisme pour se développer. Mais le néolibéralisme a empêché les états d’agir efficacement.
• Le premier des droits, celui de s’alimenter, est lui aussi attaqué par le néolibéralisme. Deux ans près la création de l’OMC, en janvier 1995, la faim dans le monde s’est mise à augmenter.
Quels doivent être les objectifs du mouvement altermondialiste ?
• Alerter, informer et mobiliser pour une mondialisation humaine.
• Avoir un projet pouvant mobiliser les populations du monde entier.
Les 10% du PIB captés par les financiers sont une injustice vis-à-vis des travailleurs, mais en plus ils donnent du pouvoir, y compris pour contrôler la société, en particulier à travers les médias.
Si l’on récupérait ces 10%, il ne faudrait pas que cela profite seulement aux travailleurs des pays les plus favorisés. C’est un discours un peu difficile à tenir pour les politiques, les syndicats... Pourtant, il faudrait que nous portions des revendications par rapport aux droits sociaux fondamentaux : droits à s’alimenter, à se loger, à accéder à l’eau potable, à l’éducation et à la santé. Il est nécessaire qu’Attac lie son discours intellectuel à un vrai discours militant, mobilisateur et mondialement rassembleur.

La promotion de droits nécessite de réfléchir à leur financement.
• Agir contre les paradis fiscaux, qui, outre l’évasion fiscale, sont un véritable point bas du dumping fiscal, un plancher vers lequel tendent les fiscalités de l’ensemble des pays du monde.
• Nationaliser ou mutualiser tout ce qui peut l’être du système bancaire mondial afin de réguler les mouvements de capitaux pour les réorienter vers la satisfaction des besoins sociaux et environnementaux.
• Face à la crise financière, appliquer les principe « pollueur payeur », c’est-à-dire faire payer ceux qui ont profité de la spéculation, d’où, à l’échelle mondiale :
• créer une taxe sur les transactions financière alimentant notamment un fonds qui interviendrait en cas de crise ou de faillite de banques.
• Instaurer un impôt très progressif sur les revenus du capital, avec un taux d’imposition très élevé sur les revenus supérieurs.
• Mettre fin aux stocks options qui poussent les dirigeants à faire des profits à court terme d’où une financiarisation de l’économie.
• Interdire les fonds de pension qui rendent les futurs retraités complices du système actuel.

Les regroupements à tous les niveaux sont nécessaires pour être plus efficaces. Au niveau mondial, le Collectif « Notre monde n’est pas à vendre » a aidé au blocage actuel de l’OMC. La mobilisation des pays du Sud est plus facile s’ils se savent soutenus par des organisations de pays du Nord. D’où l’importance de forums sociaux mondiaux : ce sont des lieux qui permettent de se rencontrer et de réfléchir ensemble. L’objectif du prochain forum social de Belém (du 27 janvier au 1er février 2009 au Brésil) est de décider de mobilisations mondiales avec des objectifs concrets. Il s’agit maintenant d’établir un plan d’action vis-à-vis de la crise mondiale (et pas seulement financière) afin de promouvoir des droits mondiaux et de sauver la planète.