Dette publique, enjeu démocratique

, par Seb

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 Spectre — Le grain de son

Édito

« Gardez-vous d’avoir des dettes, dit un proverbe arabe, car les dettes sont une cause de souci pendant la nuit, et de honte pendant le jour ». « Le beau moment d’une dette, c’est quand on la paye », proclame le dicton russe, alors que pour les français, « Qui paye ses dettes s’enrichit » !

Couverture du livre de David Graeber : "Dette, 5000 ans d’histoire"
Éditions Actes Sud
https://www.actes-sud.fr/node/55181

La culture populaire regorge de sentences et de maximes nous rappelant l’importance économique, mais surtout morale, de régler ses ardoises. Une morale qui s’est particulièrement répandue au XIXème siècle, avec l’avènement du capitalisme, et véhiculée par plusieurs hommes de lettre. « Un honnête homme s’acquitte toujours de sa dette, elle lui pèse », nous rappelait Victor CHERBULIEZ, un obscur académicien né en 1829 en Suisse – ce n’est certainement pas un hasard. Une phrase qui lui avait peut-être été soufflée par son contemporain Henri-Frédéric AMIEL, écrivain et philosophe suisse – lui aussi ! - qui disait que « payer sa dette est un devoir pour tout homme honnête ».
Un devoir pour l’emprunteur, certes, mais surtout un enjeu crucial pour le prêteur. Les bailleurs de fonds ne craignent rien tant que les mauvais payeurs, qui les priveraient non seulement du capital avancé, mais aussi des confortables revenus que leur assure le paiement des intérêts. C’est pourquoi, c’est bien connu, « on ne prête qu’aux riches » !

Couverture du livre "La dette publique ; Précis d’économie citoyenne".
Par Eric Berr, Léo Charles, Arthur Jatteau, Jonathan Marie et Alban Pellegris pour le collectif des Economistes atterrés, Le Seuil
https://www.atterres.org/livres/la-dette-publique/

Enfin presque. Car des mauvais payeurs, il y en a, et pas toujours par manque de morale ou par malhonnêteté. En France en 2022, on comptait 113 000 ménages surendettés, un chiffre en baisse depuis plusieurs années, même si le montant moyen de la dette de chaque ménage surendetté est, lui, en hausse. Le montant global de la dette des ménages surendettés est de 4,3 milliards d’euros. C’est beaucoup moins que l’endettement des entreprises, qui a fortement augmenté depuis la crise du Covid, au point de représenter aujourd’hui plus de 80 % du Produit Intérieur Brut, soit le niveau le plus élevé de la zone euro.
Voilà pour la dette privée. Mais qu’en est-il de la dette publique ? De celle de l’État, dont on n’arrête pas de nous rebattre les oreilles ?
« Je suis à la tête d’un État qui est en situation de faillite », prétendait le Premier Ministre François FILLON en 2007. Où en est-on aujourd’hui ? Croule-t-on sous la dette comme on nous le répète souvent ? Vit-on « au-dessus de nos moyens » ?

Photo de Thomas Sankara, rappelant son discours sur le front uni contre la dette - 29 juillet 1987, Addis-Abeba.

La dette publique s’établit en 2023 à plus de 3 000 milliards d’euros, soit 112 % du PIB. Est-ce que c’est grave ? Sommes-nous tous ruinés ? Est-ce qu’on va tous mourir ? Est-ce que cette dette pèse, comme on l’entend parfois, sur les épaules de nos enfants et est-ce qu’elle compromet leur avenir ?
« Un bébé français doit 25 000 € dès sa naissance ! », nous dit-on. De quoi nous faire passer l’envie de faire des enfants. De quoi nous angoisser.
Et surtout, de quoi nous interroger : comment allons-nous rembourser ces 25 000 € ? Qui va les payer ? À quoi servent-ils ? Et d’abord, question jamais posée : à qui les devons-nous ? C’est vrai, ça : l’État s’endette, mais auprès de qui ?
Toutes ces questions sont essentielles si on veut comprendre quelque chose à la dette publique, et il est essentiel d’y comprendre quelque chose car le sujet est très souvent instrumentalisé pour nous expliquer que nous dépensons trop, que ça ne peut plus durer et qu’il faut faire des économies. Et donc mener des politiques d’austérité, geler les salaires, diminuer les prestations sociales, privatiser les services publics, etc, etc...
Nous sommes dans un pays riche, certes, mais très endetté. Donc, c’est comme s’il était en faillite. En crise. À cause de la dette.

Dette publique : illégitime à 59 %
Le Collectif pour un audit citoyen de la dette a publié [mardi 27 mai 2014] son premier rapport sur la dette publique française. Il révèle que 59 % de la dette publique est illégitime et met en cause les politiques d’austérité.
https://www.politis.fr/articles/2014/05/dette-publique-illegitime-a-59-27152/

Sauf que ce qu’on appelle « la crise de la dette », ce n’est pas quand on emprunte trop, c’est au contraire quand on n’emprunte plus parce qu’on ne veut pas nous prêter. Et pour l’instant au moins, ça ne semble pas être le cas.
Alors, la dette publique, est-ce un épouvantail pour mieux nous impressionner, ou un piège dont il faut se sortir ?

Pour y voir plus clair, le Grain de Son reçoit aujourd’hui Marc CHOVIN, professeur d’économie et membre de La France Insoumise, et Claude VALLENET, membre d’Attac Puy-de-Dôme.

Invité-e-s :

  • Marc CHOVIN, professeur d’économie et membre de La France Insoumise
  • Claude VALLENET, membre d’ATTAC63

Musiques :

  • Ali’n & Cesko : Quelle dette ???
  • Chico Cesar & Fabulous Trobadors : Il faut payer (devo e nao nego)
  • Zêdess : Cadeau empoisonné
  • Juste Cause : La dette de l’Occident

Bibliographie :